L’Homme de la rue

Capra dénonce dans ce film la récupération de certaines valeurs, à travers les médias (journaux et radio) à des fins financières et politiques. Il oppose John Doe à son fidèle compagnon Colonel : d’un côté la sincérité et l’honnêteté, de l’autre la lucidité mais aussi un repli égoïste sur soi. Dans ce film, Capra reprend des thèmes développés dans d’autres œuvres : l’exploitation des sentiments à des fins lucratives (The Miracle Woman), la pureté des sentiments (Mr Deeds Goes to Town), l’extension d’un mouvement humaniste (You Can’t Take It with You), la lutte contre l’injustice (Mr Smith Goes to Washington). Il y ajoute une dénonciation de la « discipline hitlérienne » (on n’oubliera pas que le film a été tourné en 1941 alors que la guerre faisait rage) et une exaltation de « l’esprit de Noël » : s’aimer les uns les autres. – Olivier Gamble, Guide des films (Coll Bouquins, Robert Laffont, 1990). Revoir L’Homme de la rue aujourd’hui est tout à fait vertigineux. Dans la deuxième moitié du film, chaque scène résonne avec notre actualité. Le cinéaste démonte les ressorts de la manipulation, de la propagande et du populisme avec une véritable gourmandise. Bien avant les réseaux sociaux, il montre comment la radio, la presse et les grands rassemblements politiques pouvaient déclencher des emballements sincères et/ou déraisonnés, vite récupérés par les puissances politiques et médiatiques. Un conte moral d’une modernité époustouflante. – François Aymé